Vingt-cinq ans. C’est l’âge qu’a obtenu la franchise Need for Speed le 31 août dernier. Electronic Arts ne pouvait décemment pas manquer cette occasion pour offrir aux joueurs un nouvel opus, révélé il y a tout juste quelques mois et malheureusement sorti dans l’ombre d’un certain Death Stranding. Troisième jeu post-reboot, Need for Speed Heat arrive deux ans après Need for Speed Payback, qui a rencontré un succès plutôt mitigé. Cet épisode anniversaire, toujours développé par Ghost Games, parvient-il à relever le niveau ? Nous avons pris la route direction Palm City pour le découvrir.
Test réalisé sur PlayStation 4 à partir d’une copie numérique fournie par l’éditeur
Une campagne à toute allure
Après avoir temporairement posé ses bagages à Fortune Valley, une version fictive de Las Vegas, le jeu de courses déménage. Cette fois-ci, l’action se déroule à Palm City, une ville imaginaire calquée sur le modèle de Miami dans laquelle la police a mis en place une unité spéciale destinée à mettre un terme aux courses de voitures clandestines. Nous y incarnons un héros sans réelle identité – on doit le choisir parmi une dizaine d’avatars masculins ou féminins, personnalisables et interchangeables à n’importe quel moment – qui arrive et fait la rencontre de Lucas et Ana Rivera, deux coureurs réputés dans le milieu. La suite, vous la connaissez probablement déjà. Fraîchement débarqué, vous allez devoir vous faire une réputation en compagnie de vos nouveaux amis en multipliant les courses vous permettant d’affronter d’autres crews, jusqu’à attirer l’attention de la crème de la crème : la Ligue. Bien entendu, cela ne sera pas chose facile puisque vous allez devoir faire face à l’unité spéciale dirigée par le Lieutenant Frank Mercer, plus que déterminée à vous mettre des bâtons dans les roues… sans mauvais jeu de mots.
Vous l’aurez compris, ce n’est définitivement pas pour son scénario que l’on retiendra cet opus qui se contente de reprendre une formule déjà bien connue de ce type d’aventure. Avec ses personnages principaux (comme secondaires) dénués de prestance et ses rebondissements prévisibles, Need for Speed Heat propose une campagne aussi courte qu’expéditive qu’on suivra sans enthousiasme particulier. Il est clair que l’histoire n’était pas un élément important pour les équipes de développement du jeu, et c’est bien dommage. En étant un peu plus longue mais aussi surtout plus travaillée, en mettant par exemple en scène des missions scénarisées différentes des traditionnelles courses attendues, ce nouvel opus aurait pu tirer son épingle du jeu sans avoir à trop en faire non plus. Mais on ne lui en tiendra que peu rigueur étant donné que ce n’est pas forcément le point que l’on attend le plus dans un jeu de courses.
D’ailleurs, précisons-le tout de suite, le jeu n’est absolument pas avare en contenu malgré la courte durée de sa campagne. Il regorge en effet de nombreuses activités réparties dans toute la ville et accessibles à n’importe quel moment, de manière illimitée. En parallèle des missions principales, vous pouvez ainsi vous livrer à quelques missions secondaires destinées à vous faire acquérir une meilleure maîtrise de votre véhicule, à tout un tas d’épreuves (courses, drifts, contre-la-montre) permettant de gagner de l’argent et de la réputation ou encore à des objectifs annexes divers et variés. Parmi ces derniers, vous aurez notamment à détruire des panneaux et néons, récupérer des Street Arts, battre différents records (longueur de saut, vitesse de radar) et même réaliser des défis quotidiens, de jour comme de nuit. En d’autres termes, vous avez à votre portée de nombreuses heures de jeu. Cependant, il est certain que tout le monde ne trouvera pas la détermination de mener à leur terme l’ensemble de ces activités qui peuvent s’avérer très répétitives malgré les récompenses uniques qu’elles permettent de débloquer.
Du flouze le jour, de la Street Cred la nuit
Comme nous l’avons évoqué ci-dessus, progresser au sein de l’histoire du titre de Ghost Games nécessite de se faire une réputation, sans quoi certaines missions s’en retrouveront temporairement inaccessibles. Pour ce faire, Need for Speed Heat repose sur un système cyclique plutôt sympathique qui possède une grande importance dans la manière d’aborder le gameplay. Pour cause, en passant par le garage, le joueur peut choisir de courir de jour ou de nuit, en sachant que les gains rapportés ne seront pas les mêmes. En journée, vous pourrez réaliser vos courses et objectifs en toute tranquillité puisque celles-ci sont autorisées. Vous n’aurez donc aucun problème avec la police et cela vous permettra de gagner beaucoup d’argent afin de pouvoir customiser votre véhicule ensuite. Nous reviendrons sur ce point un peu plus tard. La nuit en revanche, absolument toutes les activités sont prohibées, et les patrouilles de police sont nombreuses. De ce fait, en défiant la loi et les autorités pour vous livrer à des courses clandestines ou pour réaliser vos défis annexes, vous gagnerez en réputation et pourrez continuer à réaliser les missions de campagne, tout en débloquant de nouvelles pièces de performance pour votre bolide.
Cela va de soi, plus vous réaliserez d’activités nocturnes, plus vous ferez augmenter votre niveau d’alerte qui, à l’instar d’un Grand Theft Auto, est un indicateur de la présence et de la férocité de la police dans les rues de Palm City. Croisez-les et il s’en suivra immédiatement une course-poursuite effrénée de laquelle il sera de plus en plus difficile de se sortir. D’autant plus que cela peut se faire à n’importe quel moment, que vous soyez en simple balade ou au beau milieu d’une épreuve. Ainsi, jouer de jour ou de nuit offre une expérience radicalement différente, et c’est surtout la nuit que le sel de la formule Need for Speed fait mouche. Malheureusement, c’est un jeu dangereux qui peut se révéler aussi exaltant que frustrant, la faute à un déséquilibre évident en faveur des autorités. Particulièrement vives et agressives, échapper aux patrouilles semble parfois relever de l’impossible tant les moyens déployés sont démesurés : renforts, véhicules blindés, voitures bélier, hélicoptère, herses, barrages et autres joyeusetés viennent rapidement s’ajouter au tableau.
Conséquence à cela, notre véhicule subit rapidement les dégâts de tous ces assauts qui peuvent ainsi nous empêcher de rejoindre une station-service à temps. Si ces dernières permettent de réparer sa voiture de manière illimitée en pleine journée, elles ne peuvent le faire qu’à trois reprises la nuit, après quoi elles sont fermées par les forces de l’ordre. Sachant qu’il n’est pas rare de subir des accidents à cause des forces de police, autant dire que la situation devient rapidement délicate, surtout lorsqu’on se retrouve bloqué et encerclé par trois à six voitures ne nous laissant aucune chance de repartir. Et ce ne sont pas les bonus actifs et passifs que l’on peut s’octroyer qui nous sont d’une grande utilité. Vulnérable de bout en bout, il nous est réellement impossible de réagir pour nous en sortir. En résumé, préparez-vous donc à devoir régulièrement vous asseoir sur votre boost de réputation (le niveau d’alerte, allant de 1 à 5, faisant également office de multiplicateur) et à perdre vos dollars par dizaines de milliers pour cause d’arrestation. On ne va pas se mentir, finir la nuit avec seulement 10 000 points de réputation contre les 70 000 escomptés, c’est toujours énervant.
Pimp for Speed
Heureusement, et bien que cela puisse prendre un peu plus de temps que prévu à cause de ces désagréments, vous constaterez rapidement que le jeu en vaut la chandelle. De retour au garage, on éprouve une grande satisfaction à chouchouter notre bolide grâce à un système de customisation des plus poussés. Combinez l’argent dignement remporté durant les épreuves de jour à la réputation durement acquise durant les épreuves de nuit, et vous disposerez d’un grand ensemble de pièces vous permettant de pimper votre voiture, aussi bien sur le plan visuel et sonore que performatif. C’est d’ailleurs là l’une des forces de ce Need for Speed Heat, qui met à notre disposition plusieurs centaines d’éléments de personnalisation à utiliser sur près de 130 véhicules disponibles chez le concessionnaire. Vous êtes plutôt Ford, Subaru, Mercedes, BMW, Porsche, Audi ou encore Lamborghini ? Vous êtes plutôt modèle vintage des années 1960 ou moderne de notre époque ? Vous n’aurez que l’embarras du choix et vous trouverez forcément votre bonheur.
Évidemment, par-delà l’aspect cosmétique, vous devrez surtout vous concentrer sur les performances de votre voiture. Pour cela, vous aurez la possibilité d’apporter une série de modifications aux différentes pièces du moteur, aux freins, aux suspensions, aux pneus, et plus encore. Plus vous investirez dans des pièces de qualité, plus les stats et le niveau général de votre voiture augmenteront, ce qui vous permettra d’accéder à de nouvelles épreuves aux récompenses plus importantes. C’est également par ce biais-là que vous pourrez optimiser votre style de conduite, en sélectionnant les composants les plus adaptés à vos besoins. Si vous souhaitez faire en sorte que votre bolide dispose d’une bonne adhérence sur la route tout en privilégiant la vitesse pour les courses, alors il faudra choisir les pièces allant en ce sens. Cela signifie bien sûr que vous rencontrerez plus de difficulté à faire des drifts ou à faire du tout-terrain. Ne négligez surtout pas cet aspect car l’impact se ressent réellement une fois sur les circuits. Si vous n’êtes pas équipé selon les recommandations de l’épreuve que vous visez, vous vous retrouverez en difficulté et aurez bien du mal à garder le contrôle de la voiture.
Du fun pour tous
Notez en revanche que le titre de Ghost Games n’a pas pour volonté de proposer une expérience orientée technique et simulation. Le jeu est largement accessible au plus grand nombre, même aux moins connaisseurs du milieu automobile ou aux néophytes des jeux de courses. Le principe étant placé sous le signe du fun et de l’amusement, toute la personnalisation se fait le plus simplement du monde et ne nécessite aucunement de déchiffrer pendant de longues minutes des données statistiques en tout genre. Cela se ressent également manette en main. Passé une bonne première heure de jeu nécessaire pour bien s’habituer au gameplay et en saisir toutes les subtilités, vous n’éprouverez plus la moindre difficulté à vous lancer à toute vitesse sur les routes de Palm City, slalomant tel un pilote entre les quelques véhicules qui occupent les rues ou faisant crisser vos pneus en driftant dans les virages les plus serrés. Malgré ce côté arcade assumé, il reste tout de même dommage que la gestion des dégâts environnementaux soit aussi excessivement irréaliste. Du simple panneau au grillage, en passant par des murets de pierre, des poteaux électriques ou même des arbres, presque tout se traverse et se brise sans que le moindre impact ne se fasse ressentir. S’il est évident que cela a été fait dans un but ludique, le résultat demeure tout de même quelque peu surprenant.
Contre-visite à Palm City
C’est l’occasion idéale pour aborder la question de la technique à proprement parler. Autant le dire tout de suite, ce n’est pas le point sur lequel le jeu excelle le plus. Si Need for Speed Heat prend tout son charme durant les séquences de nuit, où il parvient à bluffer par la beauté de ses jeux de lumière et la gestion des effets de réflexion sur les différentes surfaces, il accuse un certain coup durant les phases de jour, où les défauts ont tendance à ressortir davantage. Non pas que le jeu soit moche, loin de là. Mais pour une ville censée être inspirée de Miami, on ne pourra que regretter la tendance maussade qui se dégage de Palm City la majeure partie du temps, surtout quand cela ne fait qu’accentuer la qualité peu reluisante de certains éléments du décor. On ne peut pas en dire autant de la qualité des cinématiques, qui sont plutôt indignes d’un jeu de cette génération, et plus encore de fin de génération. Entre l’aspect figé des personnages, les animations aussi rigides que buguées ou encore la forte présence de clipping et d’aliasing, la qualité laisse franchement à désirer.
À défaut d’être une véritable claque, ou même de faire en sorte de nous proposer une mise en scène digne d’un tel univers, cet opus parvient néanmoins à mettre en place une ambiance plutôt agréable par le biais de sa bande-son. Avec sa cinquantaine de morceaux mêlant des tubes aux tendances urban, hispaniques, électro, dubstep mais aussi reggae, il y en a pour tous les goûts et pour toutes les ambiances. Des titres judicieusement choisis qui se marient à la perfection au gameplay pour nous immerger dans l’ambiance à la fois festive et compétitive des différentes courses, mais qui pourront rapidement lasser à force de tourner en boucle à mesure que les heures de jeu s’accumulent. Comme toujours sur ce genre de jeux, il aurait été agréable que l’on puisse profiter d’une playlist personnalisée grâce à un système similaire à celui qu’offrait SSX en 2012. À contrario, la soundtrack originale composée par Pedro Bromfman aurait méritée à être davantage mise en valeur en jeu, car force est de constater qu’elle est également extrêmement réussie.
Verdict : 7/10
Need for Speed Heat est-il un jeu mémorable ? Assurément pas. C’est un vingt-quatrième opus somme toute classique que nous offrent Ghost Games et Electronic Arts à l’occasion des 25 ans de la licence. Reposant sur une formule qui a déjà largement fait ses preuves, cet épisode ne surprend pas le moins du monde et se contente de faire ce qu’on attend de lui. Mais derrière l’aspect « cahier des charges rempli » se cache malgré tout un jeu divertissant, fun et efficace, qui compense les quelques soucis pouvant le rendre assez frustrant par moment. Il aura cependant sans doute un peu de mal à contenter les fans de la licence, ou encore ceux à la recherche d’une expérience poussée de jeu de courses.
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